miércoles, 2 de septiembre de 2015

Urwibutso, exemple d'un développement rural.



Je reviens du Rwanda après plusieurs années d'absence. J'ai pu visiter plusieurs coins du pays. Plusieurs initiatives de développement sont mises en marche dans beaucoup d'endroits. Cependant, l'entreprise Urwibutso de Nyirangarama dans le district de Rulindo a le plus attiré mon attention pour son originalité, la diversification de ses produits et l'intégration populaire dans ses activités.
Cette entreprise est née d'un enfant du coin qui s'appelle Sina Gérard vers les années 80. A cette époque, Nyirangarama était un petit centre dominé par les restaurants des hommes importants comme Damien Libakare et Claver Mvejuru. Tous les véhicules en direction de Ruhengeli - Gisenyi, s'arrêtaient pour y prendre le repas ou étancher la soif. C'est en ce moment là que Sina démarra sa créativité.
Il initia d'abord un petit commerce qui ne pouvait, en aucun cas, concurrencer les anciens de la place. La nuit, à la fermeture des grands restaurants, il vendait de petits articles de première nécessité et préparait l'omelette pour les voyageurs nocturnes. Personne ne faisait attention à l'évolution lente mais sure de ce garçon qui brillait pour son respect, sa propreté et la qualité de son service. Petit à petit, son nom commença à être connu. Il roulait à vélo.
Vers les années 90, Sina fit un saut qualitatif important. Il inventa urwibutso (souvenir). Au départ, Il s'agissait d'une sorte de petit beignet original made in Nyirangarama, recette introuvable ailleurs. Très vite, ce beignet atteignit une telle renommée qu'aucune voiture ne passait à cet endroit sans marquer un arrêt et faire la commande. Ce fut le début de la grande aventure Urwibutso, actuellement en vogue. Plus tard, appuyé certainement par Damien dont il épousa la fille, ce qui était un petit commerce des articles, se transforma graduellement en une chaîne de production de produits alimentaires qui fait de Nyirangarama aujourd'hui un lieu d'arrêt obligatoire et une référence obligée pour le développement rural.

                                                    Nyirangarama est devenu une petite ville moderne.
Comme partout ailleurs, le génocide de 94 arrêta momentanément la croissance de ce qui devenait déjà un commerce prometteur. L'entreprise ne put reprendre que deux ans plus tard, prenant définitivement le nom d'Urwibutso en souvenir des fameux beignets . Mais, cette fois-ci, il ne s'agissait plus seulement des beignets mais d'une usine en bonne et due forme de fabrication des jus concentrés de toute sorte de fruit et d'une variété d'autres produits du champs. Des recettes nouvelles toutes originales les unes que les autres firent apparition pour le bonheur des passants, de tout le pays et finalement pour le marché extérieur. Ce qui était un petit noyau devint vite une affaire de grande envergure. Aujourd'hui, on y trouve une usine de fabrication de agashya (jus concentré de maracuja) introuvable ailleurs au Rwanda, akabanga (piment liquide), akarusho (vin de banane), akandi (eau potable embouteillée), le vin rouge produit des raisins plantés sur les collines de Tare, des biscuits issus des patates douces, une gamme variée de pains et de beignets etc.


Certains produits ont dépassé les frontières du Rwanda et ont valu à son inventeur des trophées de grande importante pour leur qualité et leur originalité. Des organismes d'Allemagne, des Etats-unis, de l'Angleterre etc. ont décerné leurs coupes à l'entreprise. Les visiteurs de marque comme le président Paul Kagame, l'ancien premier ministre britannique Tony Blair y ont fait expressément leur visite.
Voulant valoriser l'agriculteur, Sina n'a rien laissé de côté. Son entreprise fait de l'élevage, un élément important du développement. A part la production des consommables, on trouve aussi développé l'élevage des porcs, des vaches, des chiens de garde, des lapins etc.
Cependant ce qui fait de cette entreprise quelque chose d'intéressant, c'est sa capacité à intégrer les habitants du lieu dans sa philosophie:  L'entreprise utilise au maximum de ses activités, plus de 300 travailleurs fixes et plus 300 ouvriers temporaires,  presque tous enfants du milieu. On y retrouve ceux qui ont fait des études universitaires et ceux qui n'ont pas eu l'opportunité d'étudier. Bien plus, l'entreprise achète tous les produits du champ que les habitants de la zone lui présentent. C'est une façon de les aider  à s'auto-prendre en charge. De fait, le niveau de vie de la zone a connu un essor visible grâce aux activités de l'entreprise.
Dans le cadre du développement durable à long terme, Sina Gérard a créé une école primaire et secondaire où étudient, presque gratuitement ou à moindres frais, tous les enfants du district de Rulindo qui ne trouvent nulle part ailleurs où aller. Actuellement, l'école compte plus de 800 élèves. Ceux qui rentrent tous les jours chez eux ne paient rien. Ceux qui y résident donnent une contribution pour leur prise-en-charge alimentaire. Cet élément est très important si on veut regarder loin dans l'avenir de la région. Au moment où l'enseignement coûte très cher au Rwanda, la création de cette école a été une aubaine pour les voisins de l'entreprise Urwibutso.


                                                                           Gaétan et Sina devant les élèves
En visitant les installations de cette entreprise et ses différentes activités, j'ai été sidéré par la quantité de travailleurs et la qualité du travail qui s'y fait. Plus particulièrement, j'étais frappé par le fait que l'entreprise est basé sur un principe d'équilibre moral et d'amour fraternel entre les ouvriers. De fait, chaque jeudi, tous les catholiques (y compris le patron et sa femme) sont priés de démarrer la journée par une heure de prière dans une des salles.
Bien évidemment, à la longue, il faudrait éviter que le travail professionnel ne se confonde avec les sentiments religieux! Par ailleurs, on pourrait conseiller au responsable de la société de mettre en place un système informatique solide, capable de synthétiser tout le travail fait pour la modernisation du business et sa durabilité. Une entreprise de si grande taille ne peut durer dans le temps et compétir valablement sur le marché national et international que s'il est géré par des outils modernes et du personnel intellectuellement compétent.

Nous disons merci à Sina Gérard pour ses initiatives et sa vision. Si on avait une vingtaine d'entreprises comme Urwibutso au Rwanda, je ne doute pas que les zones rurales atteindraient un niveau de développement harmonieux dans un temps record.
Gaétan


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